La Mitraillette
Jacques Le Glou

Déjà la mère à la maison
Nous criait " vivez vos passions ! "
Par la fenêtre.
Et j’appelais tous les copains,
Les petites filles des voisins,
Pour aller tenir dans nos mains
La mitraillette.
C’était celle d’un très vieux cousin
Qu’avait rougi du stalinien
Dans l’Espagne en fête.
Plus de hasard, plus de destin,
On se disait : c’est pour demain
Qu’on la f’rait claquer dans nos mains,
La mitraillette.

Faut dire que les syndicats-bordels
Nous pourchassaient dans les ruelles
Rien qu’à nos têtes,
On était déjà les rebelles
Qui remplissions toutes les poubelles
Des idées anciennes et nouvelles,
Sans mitraillette.
Curés, salauds, patrons, pêle-mêle,
Vous n’aurez pas longtemps vie belle,
Viendra la fête
Y aura le jeu du plus cruel ,
On empaillera un flic modèle
Pour que plus tard on se rappelle
Leur drôle de tête.

Faut dire qu’on y mettra du cœur,
Les pétroleuses étaient nos sœurs,
Vienne la tempête,
Makhno, Villa et Durruti
Ont déjà su manier l’outil
Qui fait revivre la poésie,
La mitraillette.
On en refilera même à Bonnot
Pour qu’il revienne dans son auto
Trancher des têtes.
Et l’on verra cette société
Spectaculaire assassinée
Par les Soviets du monde entier,
A coup de mitraillette.